Arts et Sciences : des modalités d’un rapport
Les “Soirées nomades” nous ont invités à la Fondation Cartier à assister à une conférence-performance au titre prometteur : “Comment la littérature, l’art et la science se contaminent l’un l’autre ?”. Organisée par Danièle Rivière, des Editions Dis-Voir, dans le cadre de l’exposition MOEBIUS-TRANSE-FORME, la soirée consistait à mettre en scène un (parmi d’autres programmés) conte illustré pour adultes, sur le thème des arts et sciences. Le fil conducteur était un texte s’inspirant librement de travaux scientifiques actuels, imaginés par un écrivain (Pierre Senges) et illustrés par un dessinateur (Patrice Killoffer) et un musicien (Jean-Yves Leloup). Et cette fois le vecteur de la soirée n’allait pas des arts vers la science (captation, illustration ?), mais des sciences vers les arts (dissection, inspiration ?).
L’objectif théorique est clairement affiché : renouer avec une certaine tradition de la littérature scientifique, qui liant arts et sciences tente de faire rêver le public et de le pousser à méditer sur les mutations et les métamorphoses de la recherche contemporaine. A ce propos, cette séance s’est attachée aux recherches de Dominique Lestel (philosophe et éthologue), et de François Taddei (chercheur en génétique moléculaire).
Occasion est ainsi donnée de réfléchir aux rapports entre les arts et les sciences, et de se demander si la notion de “contamination” (réciproque ?) relève d’une mode ou d’un véritable projet de rapport ? Certes, la division du travail artistique et scientifique doit être remise en cause dans ses rigidités et dans les aveuglements qu’elle provoque. La question que se pose notre époque (et sans doute depuis quelque temps) est celle de savoir si nous n’avons pas atteint les limites de cette division (en termes de dommages causés aux deux domaines, d’ignorance réciproque ou de relations superficielles). Alors, outre une analyse à entreprendre des travaux qui contournent ces divisions (tant du point de vue des Arts que du point de vue des Sciences)- travaux qui doivent porter sur la possibilité d’un entre-deux pour des activités qui ne partagent pas nécessairement de frontières -, il convient de cerner les différents types de rapports possibles, envisageables entre les deux. Il importe non moins de situer la genèse contemporaine de tels projets. Une indication ? En 1990, après la mort de Joseph Beuys et de Robert Filliou, un colloque “Art meets Science and Spirituality in a changing Economy” au Stedelijk Museum, et une exposition au Museum Fodor, ont été réalisés à Amsterdam, avec le Dalaï-Lama, des physiciens, des économistes, des biologistes, des philosophes et des artistes, dont General Idea, Lawrence Wiener, Marina Abramovic, John Cage, Robert Rauschenberg…. Enfin, il est essentiel de rappeler que si on peut songer à les faire travailler à nouveau et différemment en commun, c’est qu’il y a bien toujours quelque chose de commun entre eux. Quoi ? Un objet entre-deux ? Les mêmes partages du sensible ?
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