La formation : transmission ou traduction ?

Notes contre l’intoxication par le lieu commun de la transmission
Intervention au colloque Transmettre l’art – Transmettre la liberté, Théâtre universitaire de Nantes, 5 Mars 2016

Christian Ruby*

Résumé :

 

À l’encontre de l’intoxication de l’enseignement, de la formation et de l’exposition, par une certaine notion de transmission, donnée pour la solution des maux de nos sociétés (mais sont-ils avérés ?), nous voudrions faire remarquer qu’à cette pensée de l’urgence de la liaison et du continu de pure convention pourrait être opposée la puissance de la traduction, si même on ne veut plus entendre parler des anciens principes de Bildung (Goethe, Hegel) ou de traversée (Conrad). La traduction, dans la formation comme dans la réception, favorise ce que l’idée de transmission bride : une pensée ouverte sur un avenir, qui laisse sa place à l’indétermination, à la pluralité, à des constructions culturelles sans normes, ni sanctions, mais discutables et échangeables.

Notre indulgence, à l’égard de bien trop de propos concernant nos contemporains et les « jeunes générations », devrait cependant inciter à contrer fermement au moins l’image de plus en plus « évidente » selon laquelle un lien immédiat relie ce qu’on dénomme les problèmes actuels de nos sociétés – indifférence, individualisme, séparation, dit-on – et une soi-disant suspension de la transmission. Quoi de plus « évident » dans les discours portant sur les étudiants, les élèves et les spectateurs ! Corrélatif, il faut le remarquer, à un désespoir complaisant et une conception crépusculaire de la culture qui ne trouvent leur calme que dans l’appel à une restauration de la transmission – pensée comme intérêt foncier pour la préservation de la continuité de l’association –, et non dans des analyses pertinentes. Paradoxalement, si effectivement les rapports entre les individus ou entre les générations se détériorent à ce point dans nos sociétés – si même la formation, au sens hégélien, ou la traversée, au sens de Joseph Conrad (1), sur lesquels notre culture s’est appuyée longtemps, n’ont plus d’emploi –, la transmission n’a plus d’emploi non plus dans la société ! Mais si on appelle détérioration le fait que les adultes, les formateurs n’arrivent plus à avoir raison ou ne comprennent plus les jeunes générations, ce n’est pas une quelconque transmission – existante, disparue, renouvelée – qui est responsable de quoi que ce soit !

On dirait véritablement, qu’aux yeux de beaucoup, l’heure de la dévastation de la maison a sonné, non parce que nous constatons cette dévastation, mais parce que le thème exalté de la non-transmission fait croire qu’elle est dévastée. Le cinéma y encourage. Il est frappant d’y observer tant de maisons dévastées – Kaddisch pour un ami, Eastern Boys (Robin Campillo), The Cut (Fatih Akin),… – et d’y entendre tant de fétichisme des repères revenus – L’étreinte du serpent, Back Home,… (2)

Nous craignons que la transmission ne s’affirme si violemment que d’oublier qu’elle n’est que passage et se heurte à nombre d’adversités. Davantage, il flotte dans l’atmosphère psychologique du temps, l’impression vague que l’évocation fétichiste du terme transmission est à la fois la clef du problème de l’avenir et sa solution. Comme si la transmission donnait une solution à un problème qui n’est finalement pas posé, alors que manifestement la solution crée le problème. De là sans doute sa prégnance. Mais aussi la conscience d’avoir à affronter des fils rebelles, porteurs d’un autre avenir construit à partir de la nécessité pour chacun de découvrir ses capacités plutôt que de recevoir.

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Ces remarques conduisent à se demander comment se déprendre de cette idée de transmission qui veut l’infini pour elle. Dans ce dessein, pointons trois amers, qui permettront de construire une trajectoire conceptuelle différente à travers le maquis des pseudo-évaluations des rapports entre les générations.

Premier amer : Demandons-nous pourquoi Friedrich Nietzsche, parmi les penseurs grecs qu’il déteste, sauve Thucydide, ainsi qu’on le lit dans Le crépuscule des idoles, publié en 1889, consacré à la question de la dette et de la transmission, dans la culture occidentale. Nietzsche accuse Platon d’être lâche et ennuyeux, parce qu’il prône la valeur de l’héritage et de la transmission. Il érige le passé en dressage de l’humanité. À son encontre, Nietzsche sauve donc Thucydide parce que, paradoxalement comme historien, il a le courage qui manque à Platon d’évaluer l’héritage et de refuser le passage de l’identique à l’identique, en en appelant à une retraduction permanente.

Deuxième amer : Interrogeons les formateurs qui oublient peu que la formation des jeunes générations est moins affaire de transmission que, selon les cas, de marche du pèlerin engagé sur le chemin sinueux de la vie, ou de cheminement de la conscience à partir des obstacles placés devant elle, ou encore de rectification permanente dans la confrontation à des obstacles,… disons, de traduction permanente de ce qui est proposé en autre chose.

Troisième amer : Soulignons que les oeuvres d’art n’ont pas besoin de transmettre quelque chose, leur présence seule suffit. En revanche, le spectateur – nous l’avons montré dans nos travaux – s’exerce par et grâce à elles, en retraduisant dans ses mots et selon son expérience propre ce à quoi il est appelé à s’exercer ou ce qui lui est proposé. La traduction leur est plus essentielle que la transmission (ce sont les musées qui s’arrogent ce rôle).

Autrement dit, avec l’appel à la transmission, on regarderait en arrière, tandis qu’avec l’interprétation de la formation en termes de traduction, on regarderait en avant, on ouvrirait sur du nouveau en prenant ses distances avec un passé, sous forme d’héritage sans testament (René Char). La traduction, épistémique ou esthétique, permet sans doute même à chacun de se construire culturellement, sans normes et sans sanctions, puisqu’elle n’a nul besoin de se soumettre à des références uniques et prégnantes. Elle appelle chacun à trouver en soi-même des principes d’existence, et non moins à fabriquer du commun et du successif sans référence à la transmission.

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Nous ne voyons d’ailleurs que deux manières de valoriser la transmission, disons l’idée commune de transmission, avec son cortège de référence à    des bergers, des timoniers, des maîtres et des brebis égarées, sans allusion pour l’instant à d’autres modalités éventuelles (par exemple : Art Cooperation Transmission Demokracy, ACTD, un collectif prônant la capacité de l’art à penser, inventer et représenter les changements démocratiques au cours de la globalisation). Si, dans notre contexte, elle peut avoir une positivité, c’est :

– En imposant de borner l’omnipotence de l’idéologie de la communication, dans la mesure où cette dernière prétend poser des significations immédiates, et immédiatement échangeables; à son encontre, l’idée de transmission rappelle du moins que les significations sont plurielles, complexes et ne peuvent faire l’objet d’un simple transvasement (3) ;

– En obligeant à réfléchir à nouveau aux modes d’enseignement – qui furent longtemps liés à la notion de forme et d’effort de maturation –, non qu’ils doivent se plier à une quelconque transmission, mais parce qu’on requiert d’eux qu’ils transmettent. Ainsi Catherine Francblin évoque-t-elle ce qu’elle nomme la crise des modèles d’enseignement (de l’art) : « Le fait est que pour pouvoir se reconnaître des modèles, il faudrait avant toutes choses les connaître. Or, l’un des arguments utilisés pour critiquer l’art le plus contemporain et les jeunes artistes, c’est justement leur prétendue absence de culture » (4). Et on sait qu’à cette question, la réponse courante renvoie à la transmission, conçue comme résolution du problème de la culture, quand elle n’est pas associée, sans précision, à une autre réponse : celle de la perte d’expérience (sur fond de pensée de Walter Benjamin (5)).

En rapport avec ce système d’appréciation de notre époque (désespoir/transmission), on peut toutefois se demander pourquoi GWF. Hegel, qui n’avait évidemment pas lu Sigmund Freud, fait d’Œdipe une figure entièrement positive. Pourquoi ? Parce qu’il se libère du lien hégémonique aux dieux et aux pères (morts). En quelque sorte, Œdipe, pour Hegel, esquive l’initiation par la transmission pour instaurer une royauté orgueilleuse, qui ne déplait pas à Hegel, une royauté sans héritage. Est-ce la bonne manière de répondre à la Sphinge ? En tout cas, cela oblige à nouveau à prendre au sérieux l’idée de cultures détransmissionnalisées, où plus rien ne fait fonction de transmission ritualisée, sinon qu’elles obligent à intérioriser le message de la Sphinge : humain, débrouille toi ! Est-ce l’incertitude sur notre capacité à répondre à la Sphinge qui nous ronge de l’intérieur, au point de préférer la transmission ?

            En tout cas, nous ne croyons pas n’avoir le choix qu’entre la transmission et l’errance.

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La difficulté qui inflige cette suspicion à l’égard de la transmission est la suivante : si l’on peut sentir qu’une partie centrale se joue autour d’elle, il n’en reste pas moins qu’elle est presque toujours à la fois décrétée comme nécessaire, et pensée causalement, linéairement et sans perte. Ses bienfaits viendraient de là, de sa capacité à faire transiter des valeurs identiques directement et sans accident. Elle fascine parce qu’elle se pare d’une vertu mécanique : une cause, un effet ; même cause, même effet ; antériorité et primauté de la cause, contiguïté et proportionnalité de l’effet, toujours second ; ni irrégularités, ni obstacles, ni hiatus. Parfois, d’ailleurs, elle est imagée sur le modèle de la paternité, qui pourtant, chacun le sait, n’est pas mécanique, mais se livre ici comme mécanique ! Tel père, tel fils, etc.

La rigidité du propos, si elle convient à une certaine physique, ne convient pas à la culture (6). Dans cette sphère, ni causalité unique, ni causalité mécanique, ni transfert automatique, ni répétition à l’identique, etc. Ce genre de raisonnement oblige à en rester à l’énoncé de conditions techniques et psychologiques de la transmission réussie (lutter contre la perte des valeurs, des repères, revenir aux assignations, appel à la mémoire,…) afin de traiter d’un rapport des individus à la culture qui devrait demeurer critique, mais qu’ils traitent de manière nostalgique en référence à un soi-disant âge d’or de la société policée ou à une grandeur passé, voire du passé.

            Dans cette idéologie de la transmission, évidemment, l’impasse est faite sur la transmission inégale, et indirecte ; sur le fait qu’elle n’obéit jamais à un schéma mimétique ou à un schéma généalogique, ces croyances qui ont tant d’emprise sur les pédagogues paresseux. D’ailleurs, lorsque cela ne fonctionne pas (ladite transmission), on déclare que les problèmes viennent des gens à problèmes et non d’un problème mal posé (7). Pirouette, bien sûr.

Impasse est faite aussi sur l’histoire, puisqu’on évoque souvent des références à la translatio studiorum des médiévaux, et surtout de Al Fârâbî, alors que cette transmission-là, au demeurant condamnée par François Rabelais, chacun s’en souvient, suppose que la philosophie est acclimatée dans son milieu, qu’on y dispose d’un public constitué de philosophes, et qu’elle se joue d’un univers structuré d’adversaires (8). Ce qui n’est plus notre cas.

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Venons-en aux fils rebelles qui hantent notre propos (9). Souvenons-nous de Philippe II d’Espagne accueillant son fils : « Voilà mon futur assassin ! » (Friedrich von Schiller, Don Carlos), en une conscience assez précise du problème de la succession humaine.

Nous aurions pu évoquer Les Brigands, du même Schiller, voire les Vêpres siciliennes de Guiseppe Verdi : là où, dans une version saint-simonienne de la société, le gouverneur Montfort offre à son fils rebelle le pardon des conjurés s’il accepte de lui dire « père ».

Et puisque nous en sommes à citer des oeuvres d’art, quelques autres exemples :

Vito Acconci, à propos de l’art public : « Le monument, c’était l’ennemi pour moi. Ca m’obsédait un peu dans les années 1980, je voulais créer des antimonuments. Le monument en tant que tel implique qu’il soit plus grand que la personne. Je voulais l’abattre. Donc, j’ai conçu des oeuvres qui avaient l’air de gigantesques corps humains allongés sur le sol, de manière à ce que les gens puissent s’en servir », en escalader telle partie, s’approprier le lieu, et il ajoute : « Le monument, c’est un peu comme le panorama : dans la mesure où il est plus grand que vous, vous perdez le contrôle, et vous devenez en quelque sorte un subordonné » (10). Si transmission il y a, elle est celle de la rupture !

Nobuaki Takekawa, propose en 2012, à la Biennale de Lyon, une œuvre : Nous sommes les pirates d’une histoire inexplorée, constituée d’une galère lancée dans l’inconnu sous la direction de pirates à la fois savants et arriérés et de cartes non centrées sur l’occident (allégorie des temps modernes). Si transmission il y a, elle est celle de détournement et de la condamnation de l’Occident !

Jean-Pierre Raynaud, de son côté, ne veut pas transmettre un savoir, mais partager des prises de conscience,…

Arrêtons nous ici. Sinon à ajouter encore, pour rester dans les oeuvres, qu’il est nécessaire de se demander quelle signification peut bien avoir le mouvement qui accompagne le cinéma en ce moment : celui du remake. Sébastien Rongier montre que ce remake est le plus souvent traité à partir de la logique de la consommation d’un événement ou d’une œuvre rassurante : un connu qu’on pourrait encore reconnaître, le remake étant pensé comme transmission à l’identique. Or, remarque-t-il, souvent, dans le remake, l’appropriation ne conduit à aucune transmission. Il s’élève même contre le fantasme du retour aux sources. Car l’œuvre remake procède justement à l’effacement de l’œuvre source. Le remake est finalement un dispositif qui fait disparaître… au risque, parfois, de produire du conformisme sans réflexion sur la source (11). Il est de ce fait paradoxal : on croit que répéter permettra de confirmer la source, et c’est le contraire qui se produit (la source disparaît).

Deux mots encore sur les philosophes cette fois. Quand on demande à un philosophe (par ex. Gilles Deleuze ou Michel Foucault, pour m’en tenir aux références d’un de mes ouvrages) s’il s’inscrit dans une tradition de l’histoire de la pensée, on voit bien qu’il reconstruit a posteriori sa trajectoire, et qu’elle est rarement causale et linéaire ou de proximité : Deleuze dit Spinoza et Nietzsche, Foucault dit Nietzsche (alors que les plus proches sont Bachelard, Canguilhem…), etc. Il en va de même pour Jacques Rancière, qui dresse en quelque sorte une image « anormale » de la transmission. Elle se fait écart par rapport à l’idée qu’existe une école à laquelle on appartiendrait nécessairement. Cela ne signifie pas qu’il n’y ait rien antérieurement ou qu’on soit « origine » (12). Mais chacun peut renvoyer à une multitude de maîtres, qui provoquent et qui ouvrent… et à partir desquels chacun retraduit…

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Ces références à des œuvres, ce qui jouxte donc bien le problème de la formation, de l’enseignement et de l’éducation, conduisent vers un dernier point, celui d’une logique oppositionnelle. Comment se défaire et s’émanciper de la transmission, telle que définie, ou ainsi que l’écrit encore Conrad, dans Nostromo : n’est-il pas « parfois impératif de savoir désobéir aux volontés solennelles des morts », et il ajoute : « Les conseils des défunts ne doivent pas être un guide digne de foi » (13) ? Est-ce que le principe de la traduction n’est pas plus formateur et prometteur/promoteur que la transmission ? Est-ce qu’il ne respecte pas mieux le principe de l’égalité des intelligences, fondateur d’une pensée de l’émancipation ?

La traduction donc (14). Elle oblige à reconnaître d’emblée la pluralité, elle implique le multi-enracinement. Son action entraine la survie de l’autre (langue) dans la traduction même mais sans reproduction à l’identique, ni valeur de transmission. Enfin, l’infinité de la traduction d’une génération à l’autre ramène à la finitude des uns et des autres.

En ce qui regarde l’artiste en formation, n’oublions pas qu’on lui demande justement de ne pas répéter. On n’est pas dans Tolkien ! mais plutôt dans Whiplash (Damien Chazelle, 2014). Mais aussi dans Kafka, les Lettres à son père, … Se former, c’est d’abord se défaire des clichés, se déprendre des choses quelconques auxquelles on a adhéré sans réfléchir, c’est faire le vide, afin de mieux s’ouvrir sur autre chose… (ce qui ne signifie jamais ignorance du passé), c’est organiser différentes manières de se rapporter à un parcours d’histoire et de mémoire, et surtout, c’est se lancer à la découverte de ses capacités.

En ce qui regarde le spectateur, soulignons qu’il se positionne toujours dans un espace « entre » (son « moi » et l’œuvre à recevoir), dans une double connexion qui reconnaît l’étrangéité de l’autre et bientôt l’étrangéité nécessaire à son « moi » requise afin de « voir » quelque chose. Chaque spectatrice ou spectateur doit faire un effort sur soi et non répéter, et encore moins répéter les commentaires appris sur telle ou telle oeuvre.

C’est par le rapport flottant des oeuvres avec un spectateur, un lecteur, un auditeur (et donc aussi avec un artiste en formation), dans la tâche d’en devenir les interprètes actifs, d’en élaborer la traduction propre afin d’en faire sa propre histoire, et d’en concevoir la discussion et l’échange nécessaires, que la transmission peut être repensée, et devenir fructueuse. Là même où elle se nie comme transmission (au sens commun du terme). Notamment parce qu’elle ne soumet plus à une assignation, et qu’elle engendre des essais multiples et ouverts. C’est cette tâche qu’il faut construire et non une transmission formelle. Et cette tâche relève de la formation des êtres humains à leur propre devenir….

            À cet égard, nous sommes frappés par deux cas exemplaires, dont nous pouvons sans doute tirer quelque chose afin de conclure ce propos. Alors qu’on s’en réclame au titre de l’éducation esthétique, pourquoi n’y a-t-il pas de problématique de la transmission chez Schiller, mais une problématique de la formation ? Et puisque beaucoup se réclament de Hannah Arendt, à propos d’une « crise de la culture » (propos convenu), soulignons qu’elle se garde bien, en ce qui regarde les artistes et les spectateurs, de les absorber dans une quelconque vertu de la transmission. Lorsqu’elle définit le spectateur arendtien, elle le pense justement par différence avec le spectateur de transmission, philistin de la culture. Le spectateur arendtien sait qu’il est possible de découvrir les oeuvres sans l’aide d’une tradition ou d’une transmission ; il peut vouloir préserver les oeuvres passées sans l’aide de la tradition ou contre les critères et les interprétations traditionnels… ou à l’encontre de la transmission, car, écrit-elle, le fil de la tradition est rompu, et nous devons découvrir le passé pour notre propre compte. La société de masse entrave bien moins que la bonne société cultivée (15).


Notes :

(1) Joseph Conrad, Jeunesse, 1898, Paris, Gallimard, coll. Pléiade, tome II, 1985 : chronique d’une traversée initiatique qui transporte de l’Occident à l’Orient, un jeune officier inexpérimenté qu’elle métamorphose, du fait de l’adversité, en marin responsable. Mais, par différence avec Hegel, il n’y a pas de téléologie dans ce cas, le navire erre comme un vaisseau fantôme, qui roule sans timonier à travers l’inconnu.

(2) Pour ne pas citer les nombreux ouvrages qui veulent expliquer ceci ou cela à « mon fils », « ma fille », « mon petit-fils », ….

(3) Catherine Millet, dans Art Press, en 1992, dans un texte intitulé : « Ce que l’art a de scandaleux ».

(4) Catherine Francblin, in Art press, n° 200, 1995, p. 55.

(5) Ce qui ne signifie pas Walter Benjamin même, les usages de sa pensée débordant cette pensée.

(6) Ni à la politique. Si on suit John Dewey, aujourd’hui fréquemment cité, on voit bien, dans Le public et ses problèmes, que l’organisation du public et de l’État ne sauraient être perpétués à l’identique. Il analyse le problème du nouveau public face à des organismes politiques hérités, et montre le risque de révolution toujours induit par leur mutation en « moules politiques et légaux établis » (1926, Pau, Farrago, 2003, p. 73).

(7) Même chose pour les écoles de spectateurs, etc.

(8) Pierre Bouretz, Lumières du Moyen Âge, Maïmonide philosophe, Paris, Gallimard, 2015, p. 49-50.

(9) Ceux qu’on peut à bon droit nommer des « déshériteurs », à suivre le propos de Vincent Kaufmann, dans Déshéritages, Suisse, Éditions Furor, 2016. Parmi eux : Stéphane Mallarmé et par exemple Francis Ponge : Œuvres complètes, Paris, Gallimard, coll. Pléiade, 2 vol., 1999.

(10) in Art Press, n° 366, Avril 2010, p. 46.

(11) Sébastien Rongier, Cinématière, Arts et cinéma, Paris, Klincksieck, 2015.

(12) Jacques Rancière, La méthode de l’égalité, Paris, Bayard, 2012, p. 93.

(13) Joseph Conrad, Nostromo, op.cit., p. 613.

(14) N’oublions pas que ce terme est inventé par Etienne Dolet pour traduire le latin translatio, et qu’il en retient l’idée d’une appropriation par changement

(15) Hannah Arendt, La crise de la culture, 1961, Paris, Gallimard, coll. Folio-Essais, 1972, p. 262.


* Christian Ruby est philosophe, Formateur de médiateurs culturels. Il est membre de l’ADHC (association pour le développement de l’Histoire culturelle), de l’ATEP (association tunisienne d’esthétique et de poiétique), du collectif Entre-Deux (Nantes, dont la vocation est l’art public) ainsi que de l’Observatoire de la liberté de création. Chercheur indépendant, ses travaux les plus récents portent sur l’élaboration d’une Histoire culturelle européenne du spectateur (3 volumes parus), ainsi que sur une théorie politique du spectateur (en cours de parution). Cette dernière s’expose déjà pour partie dans : Spectateur et politique, D’une conception crépusculaire à une conception affirmative de la culture ?, Bruxelles, La Lettre volée, janvier 2015. Il s’est spécialisé par ailleurs dans l’art public et l’art urbain, dont il commente les œuvres du point de vue esthétique (du point de vue de la relation du passant-spectateur à l’œuvre). Site de référence : www.christianruby.net

Dernier ouvrage paru : Abécédaire des arts et de la culture, Toulouse, Editions L’Attribut, 2015.

 

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